Les pneus Goodyear pour poids-lourds sont-ils responsables de nombreux accidents ?

Seule contre Goodyear, Sophie Rollet mène le combat de la vérité

Publié le 16 juillet 2020 – mis à jour le 21 juin 2021

Le Combat d’une vie pour la mémoire de son époux : la responsabilité des pneumatiques GOODYEAR enfin reconnue ?

Soutenu par le Cabinet COUBRIS COURTOIS et Associés, Madame Sophie ROLLET voit son combat récompensé.

En effet, un ensemble routier composé d’un tracteur et d’une remorque chargée de 9 véhicules neufs, a fait des embardées, traversé le terre-plein central pour finalement percuter le camion citerne circulant en sens inverse conduit par Monsieur ROLLET.

Le choc frontal a été fatal pour les deux conducteurs.

L’enquête fut classée sans suite.

Contestant cette décision, le Cabinet COUBRIS COURTOIS et Associés a déposé une plainte devant le Doyen des juges d’Instruction.

De nombreux accidents de camions similaires

Les premiers éléments de l’instruction mettent en cause les pneumatiques de la marque GOODYEAR.

Le Cabinet COUBRIS COURTOIS et Associés mettra tout en œuvre pour obtenir la manifestation de la vérité dans la poursuite de cette procédure.

Articles de presse liés

Sophie Rollet : le combat d’une veuve contre le géant Goodyear
France Inter – 16/06/2021 – Extraits

Par Fabrice Drouelle

Invité : Me Philippe Courtois, l’avocat de Sophie Rollet depuis 2014

Aujourd’hui dans “Affaires sensibles”, l’histoire de Sophie Rollet, une mère de famille, face au géant des pneus Goodyear ou le parcours improbable d’une assistante maternelle du Doubs, devenue lanceuse d’alerte. David contre Goliath.

Avant elle, il y a eu Erin Brokovich, l’assistante juridique d’Hinkley en Californie, lancée dans une guerre judiciaire contre la Pacific Gas and Electric Company, au début des années 90 ou encore Irène Frachon, la pneumologue de Brest qui avait révélé en 2010 le scandale du Médiator des Laboratoires Servier. Des femmes sans histoires, comme Sophie Rollet, des mères de famille que rien ne disposait à s’engager comme elles l’ont fait, si ce n’est un tempérament bien trempé et une incapacité à fermer les yeux sur l’injustice. Des enquêtrices autodidactes, à l’énergie et à la pugnacité inébranlables, qui ont finalement réussi à se faire entendre et même à obtenir gain de cause, au point de faire trembler des multinationales et de leur rappeler que personne n’est au-dessus des lois.

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Face à Goodyear, Sophie Rollet « seule contre tous »
Le Monde – 01/07/2020 – Extraits

Par Fabrice LhommeGérard Davet

Le Monde : avocat défense victimes dommages corporels

Dans le Doubs, cette mère de famille enquête depuis six ans pour élucider les circonstances de la mort de son mari, chauffeur routier décédé dans un accident en 2014. Sa cible : des pneus du manufacturier américain possiblement défectueux.

La mort l’escorte depuis trop longtemps. Il serait peut-être temps de s’en débarrasser… Des fenêtres de sa maison, Sophie Rollet a vue sur le monument aux morts de Geney, bourgade du Doubs de 146 habitants. Gravée dans la pierre, en hommage aux gars du coin victimes des deux guerres mondiales, l’inscription rituelle : « Geney – A ses enfants, morts pour la patrie. » Et puis, il y a son mari, Jean-Paul, fauché à l’été 2014, qui n’était pas un enfant de Geney ; mais sa veuve, elle, a gagné sa guerre.

Sophie Rollet arbore en permanence un curieux sourire, un rictus plutôt, celui d’une femme de 46 ans, seule depuis six ans, plus dupe de grand-chose. Sur un ton égal, d’une voix où ne perce aucune émotion, elle confie : « Depuis la mort de Jean-Paul, combien de fois je me suis dit que je livrais un combat perdu d’avance… On peut dire que j’ai été la chieuse. »

Par où commencer ? Elle a connu tant d’épisodes, cette histoire hors norme, portée par une mère de trois enfants, sans emploi, convaincue contre la terre entière que le décès de son mari dans un accident de la circulation n’était pas le fait de la fatalité.

Menant sa propre enquête depuis un bureau aménagé au rez-de-chaussée de sa maison, avec pour unique arme un antique ordinateur, elle est parvenue à mettre au jour un scandale potentiel, qui est susceptible d’ébranler la firme américaine Goodyear, troisième fabricant mondial de pneumatiques, près de 4 milliards de dollars (3,5 milliards d’euros) de chiffre d’affaires annuel…

L’affaire est digne d’un scénario de film, un remake à la française d’Erin Brockovich, seule contre tous, par exemple. L’analogie est évidente : en 2000, le long-métrage de Steven Soderbergh racontait le combat d’une chômeuse, avec trois enfants à charge, prête à défier une toute-puissante compagnie américaine. Le point de départ de l’histoire, transcendée par l’interprétation de Julia Roberts ? Un accident de la circulation…

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« Sincères condoléances »

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Affairée dans sa cuisine, Sophie Rollet prépare des gâteaux, un œil sur le « 13 heures » de TF1. Soudain, sa vie bascule. Le présentateur, Jacques Legros, annonce, en fin de journal, un grave carambolage impliquant plusieurs poids lourds sur l’autoroute A36, sans plus de détails. La jeune femme est comme foudroyée. « C’est papa », hurle-t-elle, une tasse de café à la main. « Je ne sais pas comment l’expliquer, mais j’ai compris tout de suite que c’était Jean-Paul », dit-elle. Elle tente de le joindre sur son portable, sans succès, puis téléphone au siège de F3C. « Et là, on me répond : “Sincères condoléances, MmeRollet. Comme ça. On ne m’avait pas prévenue, alors que tout le monde savait déjà autour de moi, la rumeur s’était propagée dans le village. »

A 9 h 08 très précisément, Jean-Paul Rollet, 53 ans, a trouvé la mort sur une portion montante de l’A36, à moins de 10 km de chez lui. Après une première livraison de carburant, il repartait se ravitailler dans un dépôt pétrolier proche de Mulhouse (Haut-Rhin) lorsqu’il a été percuté de pleine face par un poids lourd arrivant en sens inverse, la remorque lestée de neuf voitures neuves. Le véhicule en cause, dont le conducteur, Pascal Rochard, 44 ans, a perdu le contrôle, a traversé le terre-plein central, pulvérisant les glissières de sécurité métalliques avant de s’encastrer dans la cabine de Jean-Paul Rollet. Le choc, d’une violence inouïe, a tué sur le coup les deux routiers.

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« Un truc qui ne va pas »

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L’enquête en flagrance menée par les gendarmes établit rapidement la cause du drame : le pneu avant gauche du camion de Pascal Rochard a éclaté, transformant le véhicule en bombe roulante incontrôlable. Dans son édition du lendemain, le quotidien régional L’Est républicain relate les faits, en concluant qu’« il n’y aura peut-être jamais d’explication ».

Sophie Rollet, elle, en veut une, d’explication. Loin de se complaire dans ce rôle de veuve éplorée que le village souhaiterait la voir endosser, la tout juste quadragénaire est vite persuadée qu’« il y a un truc qui ne va pas ». Là encore, elle serait bien en peine de dire pourquoi. Clément, son fils aîné, 19 ans, y voit la marque d’un don particulier : « Notre mère a toujours eu la faculté de sentir les choses. Quand on était petits, si on avait fait une bêtise, je ne sais pas comment, mais elle le savait, elle le sentait. »

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Des nuits d’enquête

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En 2015, la lecture du procès-verbal synthétisant l’enquête des gendarmes, dans lequel elle détecte « des incohérences », achève de la convaincre : manifestement, elle ne pourra compter que sur elle-même pour faire avancer l’affaire. « En septembre 2015, se souvient-elle, ç’a été violent, parce que j’apprends à la fois la destruction des photos et le classement sans suite de ma plainte. » De fait, le 5 septembre 2015, le procureur de Besançon a classé l’affaire pour « infraction non caractérisée ».

Sophie Rollet ne s’explique pas pourquoi le parquet ne semble pas avoir tenu compte du rapport d’expertise soulignant que l’éclatement du pneu pouvait avoir pour origine son « recreusage », en décembre 2013, par une entreprise du Doubs spécialisée dans la rénovation des pneumatiques.

Lancée dans une offensive tous azimuts, elle bombarde de courriels gendarmes et magistrats, sollicite un avocat, Me Philippe Courtois, basé à Bordeaux et spécialisé dans la défense et l’indemnisation des victimes d’accidents corporels… Surtout, elle multiplie les recherches sur Internet sans jamais quitter son bureau. « J’ai décidé de trouver les réponses toute seule. Internet, c’est formidable, même si le réseau passe mal ici, ça marche mieux la nuit », raconte-t-elle.

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Série noire pour le pneu Marathon LHS II

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Claquemurée dans son bureau, à l’abri des mesquineries, Sophie Rollet cherche donc. Et trouve. Depuis le début, elle focalise ses investigations sur le pneu à l’origine de l’accident, un Goodyear, très précisément le modèle Marathon LHS II. Or, au moment même où elle apprend le classement sans suite du dossier, Sophie Rollet exhume des tréfonds du Web un rapport du Bureau d’enquêtes sur les accidents de transport terrestre (BEA-TT), daté de septembre 2013, analysant une collision survenue deux ans plus tôt sur l’A9, dans l’Hérault. Le drame, qui avait fait deux morts et deux blessés graves, ressemble étrangement à celui de l’A36. Là aussi, un poids lourd, pneu avant gauche éclaté, avait traversé le terre-plein central avant de percuter un camion. Le pneu en question ? Un Marathon LHS II.

Toujours à la rentrée 2015, un autre accident grave (2 morts) survient sur l’A36. En cause, encore une fois, l’éclatement du pneu avant gauche d’un poids lourd chaussé en Goodyear. Des Marathon LHS II ? « Les photos ne m’ont pas permis de l’établir avec certitude », regrette Sophie Rollet, habituée à décortiquer sous tous les angles, en les agrandissant au besoin, les photos des crashs piochées sur le Net ou récupérées auprès de photographes de presse.

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« L’impression de tenir une bombe »

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Sophie Rollet répertorie tous les accidents de ce type en France, puis en Suisse, en Belgique, enfin dans l’Europe entière. « Parfois, c’était compliqué, à cause de la langue », admet-elle. Pas grave, Google traduction vient à sa rescousse. Une fois l’accident suspect repéré, l’enquêtrice de Geney attend que le jour se lève et téléphone, envoie des courriels à tour de bras, au bluff, à des gendarmes, des magistrats, des journalistes… Lorsque l’un d’eux accepte de lui répondre, elle demande des précisions sur les faits, tente d’identifier le pneu incriminé.

« Tous les jours, je fais ma revue de presse des accidents, et j’imprime tous mes échanges, résume-t-elle. Mais je reste la veuve, la mauvaise personne, qui manque d’objectivité. » Elle contacte des fabricants de pneus, les syndicats de routiers, la commission de sécurité des consommateurs à la répression des fraudes, le ministère des transports et même Emmanuel Barbe, délégué interministériel à la sécurité routière entre 2015 et 2020… En vain : « Je n’ai jamais eu aucun retour, de personne. »

Poursuivant son combat solitaire, elle finit par découvrir que Goodyear, dans plusieurs pays, a procédé en catimini à des « rappels produit ». « J’ai par exemple trouvé des infos sur un forum allemand, avec des transporteurs tchèques parlant d’un rappel produit que je ne connaissais pas », se remémore Sophie Rollet. Se faisant passer pour une cliente lambda, elle va jusqu’à commander, avec succès, un pneu « sous rappel », donc a priori interdit à la vente ! En novembre 2015, elle parvient à établir qu’un grave accident, survenu le 11 septembre 2014 sur l’A49, est dû à l’éclatement d’un pneu Marathon. Son enquête progresse, mais dans l’indifférence générale.

C’est alors qu’elle adresse un courriel au Monde, comme un appel au secours. Recensant une série d’accidents dus, d’après elle, à des pneus Goodyear, elle écrit ceci, le 3 février 2016 : « Je ne vois pas comment le système judiciaire actuel pourrait faire vite et centraliser mes éléments. Je suis apparemment la seule à avoir fait tous ces liens, j’avoue avoir l’impression de tenir une bombe entre les mains dont je ne sais trop que faire. Aussi, un regard, une suggestion, seraient appréciables. »

[…]

Inventaire accablant

Ce texte est le début d’une longue correspondance, avec ses moments d’espoir, mais aussi de doute, comme ce 4 juillet 2018, où elle envoie au journal ce sombre message : « Bonjour, à quelques jours de la date anniversaire de l’accident de l’A36, soit près de quatre ans après les faits, je mets un point final à mes recherches… » Elle n’en fera rien. « J’ai pris mes enfants, séparément, et je leur ai demandé si je devais continuer. Et mon fils aîné m’a dit :“Maman, tu nous as toujours appris à aller au bout.” Alors j’ai continué. » 

Depuis la fin 2016, Sophie Rollet est aussi un peu moins seule. La justice a enfin accepté d’enquêter : en se constituant partie civile, le 11 octobre 2016, Me Courtois a contraint le tribunal de Besançon à ouvrir une instruction. C’est qu’au fil des mois Sophie Rollet a collecté une masse impressionnante d’informations. « C’était un travail de fou, acquiesce-t-elle. Il n’existe aucun fichier d’accidents, aucune statistique de la sécurité routière, aucune centralisation, en France comme ailleurs en Europe. »

La plainte contre X pour « homicide involontaire » rédigée par Me Courtois est sans ambiguïté. « Des fautes et manquements ont été commis », assène l’avocat, avant de dresser l’accablant inventaire des « accidents corporels, impliquant des poids lourds, dont la cause est une avarie de pneumatique », entre 2010 et 2015. Une liste établie par son opiniâtre cliente. Au total, en six ans, 76 accidents, pour un bilan terrible : 56 morts, 142 blessés. « Il est édifiant de relever que la plupart de ces accidents sont dus à l’éclatement d’un pneumatique de marque Goodyear », écrit Me Courtois. « Il est par ailleurs éloquent, conclut-il, qu’une campagne de rappel de la gamme des pneumatiques précisément référencés Marathon LHS ait été faite. La raison de cette campagne tient à l’identification de problèmes, lesquels demeurent indéfinis, et pour cause : aucune investigation n’a été faite sur ce point. »

En mai 2017, une juge d’instruction, Marjolaine Poinsard, est désignée. Pourtant, Sophie Rollet n’est pas au bout de ses peines ni de ses investigations. Car si son avocat obtient de la magistrate de faire procéder à une nouvelle expertise, voilà que le pneu en cause a disparu ! C’est seulement fin août 2018 que le tribunal parvient à le localiser, caché parmi des scellés… Une nouvelle expertise est ordonnée, fin 2018.

De son côté, Sophie Rollet, entre agacement et abattement, continue d’amasser des informations, c’est plus sûr. Il y a cette énième collision sur l’A36, en juillet 2018, tout près de l’endroit où son époux a trouvé la mort : encore une fois, un poids lourd, victime de l’éclatement d’un pneu, a traversé l’autoroute pour venir fracasser des véhicules sur l’autre voie (un mort, trois blessés graves). Ou encore ce procès, passé inaperçu, au tribunal de Mâcon, en novembre 2018 : Goodyear jugé pour un accident lié à l’explosion du pneu d’un poids lourd, à l’origine d’un accident mortel sur l’A6, en 2012. Le parquet requiert une amende de 225 000 euros contre le géant américain, accusé d’avoir mis en service un pneu défectueux, mais le tribunal prononcera une relaxe.

L’expertise qui change tout

Le 12 mars 2019, Sophie Rollet ne dissimule plus son découragement. « Est-ce que vous portez toujours un regard, un intérêt quelconque sur la problématique que nous avions pu évoquer précédemment ?, écrit-elle au Monde. Sans élément probant, je mettrais en sourdine (voire plus) mes espoirs de voir, un jour, le phénomène pris en compte par les entités/autorités normalement concernées. »

Et puis, alors qu’elle n’y croyait plus, l’inespéré survient. L’expertise qui change tout. Signée le 30 novembre 2019, mais versée au dossier il y a quelques semaines, elle est l’œuvre de Christian Duc, un ingénieur expert en pneumatiques. En 66 pages, celui-ci décrit minutieusement le mécanisme ayant conduit au drame du 25 juillet 2014. S’il blanchit totalement l’entreprise qui avait rénové le pneu en décembre 2013, l’expert met directement en cause le fabricant. Le pneu, sorti de l’usine luxembourgeoise de Goodyear en février 2011, présente, selon lui, « plusieurs anomalies affectant sa fabrication ». M. Duc dénonce ainsi « des liaisons insuffisantes et défectueuses entre les éléments assemblés, des défauts liés aux manutentions et au stockage, des irrégularités et des défauts de positionnement dans les plis ceinture ». Evoquant les rappels produit effectués par Goodyear, l’ingénieur déplore « des retraits vraisemblablement insuffisamment ciblés, puisque l’on retrouve les mêmes symptômes caractéristiques de séparation et d’éclatement pour les pneus dont le DOT se situe entre 2011 et 2013 »  le DOT (pour Department of Transportation) est le marquage indiquant l’âge et l’origine d’un pneu.

En clair, à en croire l’expert, qui valide ainsi la thèse à laquelle s’accroche Sophie Rollet depuis 2015, Goodyear aurait laissé en circulation pendant des années des pneus comportant de graves défauts de fabrication, susceptibles d’avoir provoqué une série d’accidents mortels impliquant des camions. Peut-être certains poids lourds en sont-ils d’ailleurs toujours équipés en 2020…

Sophie Rollet n’est pas près d’oublier l’émotion ressentie lorsqu’elle a pris connaissance de l’expertise. « J’ai pleuré, j’ai remercié mes enfants… Je suis toute seule, depuis si longtemps, à ramer à contre-courant, et ce rapport me dit : “Vous avez raison.” » Elle va enfin pouvoir « passer le relais », comme elle dit. A la presse, mais surtout à la justice. « Je veux me libérer d’un poids. Ai-je fait tout cela pour lui, Jean-Paul, ou pour moi ? »

Goodyear réfute toute responsabilité

De son côté, la direction de Goodyear fait savoir au Monde qu’elle réfute toute responsabilité dans l’accident du 25 juillet 2014 : « Nos équipes techniques ont examiné le pneumatique et pu constater des signes évidents d’un choc accidentel ayant entraîné sa détérioration, il n’y avait pas d’éléments particuliers en lien avec sa fabrication. » La firme assure que le pneu en cause « n’a jamais fait partie d’un programme d’échange, qui portait sur une autre génération de produits, d’une autre dimension ».

L’avocat de Sophie Rollet indique avoir demandé à la juge la mise en examen du manufacturier. « Le dossier ne peut s’arrêter là, lance MeCourtois. Ce n’est pas une affaire d’argent pour ma cliente : elle se bat pour la mémoire de son mari, mais pour les autres, aussi. Ce n’est évidemment pas un hasard, cet accident, et il se peut que ces pneus circulent encore. On aurait pu éviter tant de drames, de morts. » Impressionné par la ténacité dont sa cliente a fait preuve toutes ces années, l’avocat dit son soulagement : « Personne ne croyait en elle, on l’a prise pour une folle. »

Non, Sophie Rollet n’était pas folle, et les Geneys ne vont pas être les seuls à l’apprendre car, MeCourtois n’en doute pas, « on va passer d’un drame individuel à un scandale international ».

En attendant, le moment est peut-être venu de cesser de passer ses nuits sur son ordinateur. Elle qui se qualifie de « petite fourmi » ou de « petite bonne femme », s’inquiète : « Attaquer de front Goodyear, je risque ma maison, c’est pour ça que j’ai travaillé dans l’ombre. » Ce qu’elle a vécu l’a marquée au plus profond. « J’ai subi tant de pressions, rappelle-t-elle, y compris familiales… Je me suis sentie très seule contre tous. » Décidément, on en revient toujours à Erin Brockovich.

Sophie Rollet grimace. Elle n’est pas certaine de se reconnaître dans le personnage incarné par Julia Roberts : « J’ai vu le film. Moi, je pense plus à Irène Frachon, la lanceuse d’alerte. Parce que cette affaire, finalement, comme me l’a confié un jour un lieutenant de gendarmerie, c’est l’équivalent du Mediator dans le transport routier. » Elle évoque le long-métrage d’Emmanuelle Bercot consacré à l’affaire, La Fille de Brest, sorti en 2016. « Quand je l’ai vu, ça m’a fait drôle, j’ai reconnu les mêmes phrases, les mêmes mots… En tout cas, c’était très bien. » « La Fille de Geney », ce serait pas mal, aussi.

A Geney, Sophie Rollet mène l’enquête pour éclaircir les circonstances de la mort de son mari. Chauffeur routier, Jean-Paul Rollet a été percuté par un poids-lourd dévié de sa trajectoire en 2014. En cause : l’éclatement d’un pneu « Goodyear ». Le combat s’enclenche contre le géant américain.

Sophie Rollet se tient droite. Le regard franc, et la voix posée, la quadragénaire raconte son histoire, son enquête, son combat contre Goodyear, six ans après la mort de son mari. « Le décès de mon mari m’appartient, c’est une histoire personnelle, et ça devrait rester de l’ordre privé », rapporte-t-elle. Si la mère de famille évoque son histoire, aujourd’hui, c’est aussi pour mettre en lumière, les autres potentielles victimes.

Un éclatement de pneumatique

En 2014, un vendredi de juillet à Geney dans le Doubs. Dès l’aube, Jean-Paul Rollet part au travail, à bord de son camion-citerne. Le père de trois enfants est  aussi chauffeur routier pour la Franc-Comtoise de carburants et combustibles (F3C).

Ce même jour, sur l’autoroute A36, un poids-lourd dévie de sa trajectoire, et provoque un carambolage. Devant son écran, face au journal télévisé, Sophie Rollet a un mauvais pressentiment. C’est le véhicule de son mari qui a été percuté. Il décède à 53 ans. Le chauffeur du deuxième poids-lourd trouve lui aussi la mort.

En cause ? Un éclatement de pneumatique. Depuis six ans, des dizaines d’accidents similaires s’accumulent, avec, bien souvent, comme constante, les pneus de la marque Goodyear. Sophie Rollet tente encore de rassembler les pièces du puzzle : « La question va être : est-ce qu’il y en aurait d’autres ? Ça a été le début du début, est-ce qu’on est sur la partie immergée de l’iceberg ? J’en ai bien peur …»

Seule face à Goodyear

En 2019, une expertise précise les circonstances de l’accident de son mari, et met en cause l’équipementier Goodyear. Philippe Courtois, avocat de Sophie Rollet, détaille : « Le pneu a été mal fabriqué et comporte des défauts qui le rend impropre à à sa commercialisation et donc à sa mise en circulation. »

Le manufacturier américain rejette toute responsabilité : « Les équipes techniques qui ont examiné le pneu ont trouvé des signes évidents de dommages par impact. Aucun défaut de fabrication n’a été constaté sur le pneu ». Seule face au géant américain Goodyear, Sophie Rollet souhaite qu’une enquête judiciaire soit menée.

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Une mère de famille du Doubs enquête depuis six ans pour tenter d’élucider les circonstances de la mort de son mari, un chauffeur routier décédé dans un accident en 2014. En ligne de mire : les pneus de l’équipementier Goodyear.

Depuis la mort de son mari, depuis Geney (Doubs), Sophie Rollet cherche la vérité. Il y a six ans, sur l’autoroute le pneu d’un camion éclate et le dévie de sa trajectoire. Il provoque un carambolage. Le véhicule du mari de Sophie est percuté, il décède à 53 ans. « Le décès de mon mari m’appartient, c’est une histoire personnelle, cela devrait rester de l’ordre privé. Et la question va être, est-ce qu’il y en aurait d’autres ? », indique Sophie Rollet, épouse de Jean-Paul Rollet.

Goodyear mis en cause

Depuis 2014, Sophie Rollet enquête et recherche notamment sur le web des accidents similaires. Résultat : elle dresse un constat sidérant de 76 accidents qui auraient la même origine. En 2019, une expertise précise les circonstances de l’accident de son mari et met en cause le fabricant de pneus Goodyear. L’équipementier américain rejette toute responsabilité. Sophie Rollet, elle, souhaite qu’une enquête judiciaire soit ouverte.

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Après six ans d’enquête, une mère de famille veut comprendre les circonstances de la mort de son mari, chauffeur routier, à bord de son camion. Son travail de longue haleine pourrait finalement la porter devant un tribunal face à la firme américaine Goodyear.

« Je ne veux pas être une égérie, j’apporte juste des données » : depuis la mort de son mari routier en 2014, Sophie Rollet enquête sur les éclatements de pneus, un travail de fourmi qui pourrait finir par mener la multinationale Goodyear devant la justice.

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Jonglant entre un diagramme de sa fabrication recensant les accidents de poids lourds liés à des avaries de pneus et un article de journal néerlandais, l’assistante maternelle en cours de reconversion fait montre d’une véritable expertise sur les pneumatiques, « problématique fantôme de la sécurité routière ». Au-dessus d’elle, sur une petite étagère, la réplique exacte du camion-citerne de son mari, Jean-Paul, décédé un jour de juillet 2014, à 53 ans.

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Si au départ, l’idée d’une « fatalité du routier », voué à disparaître au volant de son camion, s’impose, Sophie Rollet veut comprendre comment et pourquoi est mort son mari. Une classique enquête pour « homicide involontaire » est ouverte mais classée sans suite en 2015, après un rapport d’expert qui ne met pas en cause le fabricant du pneu, Goodyear.

Sophie Rollet, qui s’est déjà battue en vain pour obtenir les photos de son mari décédé, dont elle n’a pas pu voir le corps, ne lâche pas prise. Elle dépose fin 2016 une plainte avec constitution de partie civile, déclenchant l’ouverture d’une information judiciaire, écrit sans relâche aux magistrats, aux gendarmes, accumule des données, compare des accidents que nul n’a jamais rapprochés.

Ses recherches se concentrent sur le pneu Marathon LHS II de Goodyear. Elle déniche un rapport du Bureau d’enquêtes sur les accidents de transport terrestre qui pointe des problèmes sur ce modèle, après un accident semblable à celui de son mari, mais ne l’incrimine pas formellement. Elle découvre que Goodyear a lancé en 2013 une campagne de rappel de ces pneus, officiellement sans lien avec des problèmes de sécurité, mais qu’il reste possible de les acheter.

Trois longues années et des heures passées sur internet plus tard, fin 2019, un nouveau rapport d’expertise confirme son intuition et met en cause Goodyear : le pneu présente des problèmes dans sa structure métallique, « non-décelables lors des suivis ». Le procureur de Besançon, Étienne Manteaux, souligne le « travail considérable » réalisé par cet expert, qui « objective un problème de fabrication du pneu net ». « De nouvelles investigations sont en cours », précise-t-il.

[…]

« Urgence sécuritaire »

« Il faut maintenant que la société puisse s’exprimer, qu’elle soit a minima placée sous le statut de témoin assistée, voire mise en examen, compte tenu du rapport d’expertise éloquent » sur le pneumatique, estime l’avocat de Sophie Rollet, Me Philippe Courtois, pour qui il s’agit d’une « urgence sécuritaire ».

Si, pour l’heure, l’instruction porte sur un seul accident, l’avocat souhaite qu’elle s’empare d’accidents similaires, en évoquant « 72 ou 73 sur les dernières années qui impliquent un pneumatique de la même marque, pour la majorité du même type ». « C’est un problème européen, pas un épiphénomène », avec une production qui s’est étendue de 2011 à 2013, insiste-t-il.

Goodyear, pour sa part, souligne dans un communiqué que « sans lien avec le pneu LHS II impliqué dans l’accident de juillet 2014, la société a mis en place un programme d’échange de pneumatiques pour une autre gamme et une autre dimension (« LHS II+ ») à partir de la fin de 2013 ». L’entreprise assure qu’« aucun défaut de fabrication n’a été constaté sur le pneu » impliqué dans l’accident.

Après six ans passés à essayer de ne pas confondre obstination et obsession, avec le soutien de ses enfants mais pas toujours de ses proches, Sophie Rollet se garde bien de crier victoire. De sa voix calme, elle dit souhaiter simplement que la justice pose enfin « un regard sérieux » sur ce dossier. Pas pour toucher des indemnités – elle en a déjà obtenu par une procédure civile en 2018 – mais pour un « effet boule de neige » sur la sécurité routière.

[…]

Depuis la mort de son mari en 2014 dans un accident de la route, Sophie Rollet enquête sur la responsabilité de Goodyear. Une expertise confirme ses intuitions.

Cela fait presque six ans que Sophie Rollet mène une enquête solitaire sur la responsabilité de Goodyear, troisième fabricant mondial de pneumatiques, dans les accidents de poids lourds. C’est la mort de son mari, Jean-Paul Rollet, chauffeur routier, en 2014, qui a tout déclenché. Une enquête pour homicide involontaire a été ouverte mais classée sans suite en 2015, après un rapport d’expert qui ne met pas en cause Goodyear.

Sophie Rollet n’abandonne pas. Une information judiciaire est ouverte en 2016 par le tribunal de Besançon après la plainte déposée par son avocat, Me Philippe Courtois.

De nombreux accidents similaires

L’enquête menée par la veuve et racontée par le journal Le Monde impressionne. Seule depuis sa maison de Geney, dans le Doubs, elle épluche tous les accidents similaires en Europe. Et après des années d’investigations personnelles, un nouveau rapport d’expertise, récemment versé au dossier, change aujourd’hui la donne. Il établit que le pneu présente des problèmes dans sa structure métallique,  non décelables lors des suivis  .

Si, pour l’heure, l’instruction porte sur un seul accident, Me Courtois souhaite qu’elle s’empare d’accidents similaires, en évoquant  72 ou 73 (accidents) sur les dernières années qui impliquent un pneumatique de la même marque, pour la majorité du même type  . Il a demandé la mise en examen de Goodyear. Le procureur de Besançon précise que de nouvelles investigations sont en cours.

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A 46 ans, Sophie Rollet se bat depuis six ans pour découvrir la vérité sur la mort de son mari Jean-Paul. Ce chauffeur routier de 53 ans est décédé dans un accident de la route en 2014. A Geney, dans le Doubs, sa veuve soupçonne un défaut de fabrication de pneus du fabriquant Goodyear.

Des pneus Goodyear responsables d’un accident mortel ? C’est le combat de Sophie Rollet, une habitante de Geney dans le Doubs. Son mari, Jean-Paul, un chaufffeur routier de 53 ans est mort en 2014 sur la route.  Pour sa veuve de 46 ans, ce n’est pas un « banal » tragique accident de la route. Depuis six ans, elle enquête dessus.

Des pneus Marathon LHS II avec un défaut de fabrication ?

Car pour elle, dans l’accident de son mari, ce sont les pneus « Marathon LHS II » du camion qui sont coupables. Des pneus de la marque Goodyear qui auraient éclaté et causé l’accident mortel : en juillet 2014, le camion de son mari est percuté sur l’A36 par un autre poids lourd qui a traversé le terre-plein. Le chauffeur a perdu le contrôle à cause d’un des pneus complètement explosé.

Une plainte en 2016

Un détail qui attire l’attention de Sophie Rollet. Elle porte plainte fin 2016 contre X pour homicide involontaire. En attendant, elle épluche des centaines et des centaines d’articles internet pour essayer de voir les marques de pneu sur les photos. Elle accumule aussi des données, compare des accidents, comme celui à Belfort qui tue deux personnes quelques semaines après la mort de son mari.  A chaque fois les pneus ont éclaté, tous de la marque Goodyear.

Une expertise confirme ses soupçons en 2019

Le géant américain a lancé une campagne de rappel pour certains, officiellement pas pour des raisons de sécurité. Fin 2019, une expertise confirme son hypothèse : il y a bien un problème de pneu, dans sa structure métallique, « non-décelables lors des suivis ». Non, répond Goodyear pour qu’il n’y a aucun souci de fabrication. L’avocat de Sophie Rollet, Philippe Courtois parle lui « d‘urgence sécuritaire« . Il demande que le manufacturier américain soit mis en examen ou placé sous le statut de témoin assisté.

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